Nabil Ennasri (directeur de l’Observatoire du Qatar) : « Un désengagement avant 2022, est quasi impossible… même en cas de scénario encore plus noir sur le plan sportif ! »

Le Paris Saint-Germain réalise une saison décevante après des échecs en Coupe de la Ligue (défaite face à Guingamp 1-3), en Coupe de France (contre Rennes 2-2; TAB 5-6) et surtout en Ligue des Champions (Manchester United 2-0 ; 1-3). Avec une seule victoire sur les six derniers matches, les parisiens vivent aussi une fin de saison galère en Ligue 1 malgré le titre de Champion de France. Une situation qui pourrait faire interroger l’investissement financier de l’Émir du Qatar dans au sein du PSG. Mais selon Nabil Ennasri, interrogé par Le Parisien, les Qataris ne sont pas prêts de bouger de la capitale française.

La perception au Qatar des critiques en France :

Le Qatar injecte plusieurs milliards en France dans l’immobilier, dans les grandes sociétés et dans le PSG. Voir un faisceau de critiques récurrentes dans la presse et l’opinion, ça suscite de l’incompréhension et de l’amertume chez beaucoup de Qatariens.

Des différences avec les autres pays :

L’investissement du Qatar est fort aussi aux États-Unis, en Angleterre, en Allemagne, en Espagne ou en Suisse et on n’a pas une polarisation aussi nette. Même si le PSG gagnait la Ligue des champions, une partie de la société française nourrirait des regrets, parce que ce serait le triomphe de l’argent roi et de l’exubérance sportive. Au Qatar, on a l’impression que les Français ne sont jamais contents. Les Qatariens peuvent être susceptibles vis-à-vis d’une population relativement ingrate.

Un désengagement du Qatar dans les années à venir ?

Un désengagement avant 2022 (la Coupe du monde au Qatar), est quasi impossible. Même en cas de scénario encore plus noir sur le plan sportif. Ce serait vraiment un aveu d’échec, pire que les résultats piteux du PSG. Le Qatar a besoin du PSG pour se doter d’un crédit footballistique en vue de la Coupe du monde. Malheureusement pour eux, cette année encore, on est passé de désillusions en humiliations. Après 2022, c’est toute la question. Je suis plutôt dans l’idée qu’ils se maintiendront. Le football sera moins important après la Coupe du monde, mais ça restera un élément majeur du soft power qatarien.

La Ligue des Champions, un échec au Qatar :

C’est vu comme un échec, mais la responsabilité n’est pas imputée à Nasser Al-Khelaïfi. Beaucoup de Qatariens sont conscients de la difficulté de s’imposer avec une équipe qu’on a achetée récemment. Au Qatar, on ne fait pas de procès à Nasser, parce qu’il est très proche de l’émir et il s’investit à fond dans le projet. Il est issu d’une grande famille respectée. Il essaie de concilier la modernité occidentale avec les coutumes tribales de la société profonde qatarienne. On a le sentiment qu’il mouille le maillot pour obtenir les résultats espérés. Nasser a fait du PSG une marque mondiale de sport, un club respecté.

L’extension du Qatar dans le football :

Il faut mettre cela en parallèle avec ce que font les voisins du Qatar. L’Arabie Saoudite et les Émirats Arabes Unis ont aussi engagé une politique de rayonnement via le sport. En particulier l’Arabie Saoudite, qui a accueilli la Supercoupe d’Italie l’année dernière et va recevoir le Dakar l’année prochaine. Elle veut sortir de cette image poussiéreuse et sulfureuse d’État moyenâgeux. Du côté du Qatar, on est dans cette volonté de poursuivre l’œuvre de réputation, en essayant de mettre des œufs dans différents paniers. Le golfe est aujourd’hui gravement fracturé, avec des adversaires du Qatar qui font tout pour lui couper l’herbe sous le pied aux niveaux diplomatique, médiatique, idéologique et donc sportif. Le Qatar ne va pas se cantonner au PSG, même si ça restera le navire amiral de sa stratégie de rayonnement au niveau mondial.

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