DOSSIER – En renouant avec ses Ultras, le PSG a relevé le plus beau défi de sa saison
Il y a les titres, et puis il y a les célébrations qui vont avec. Il y a le PSG des transferts et des récompenses, et puis il y a celui de la ferveur et des fumigènes. Il y a ceux qui transpirent sur le terrain, et d’autres qui hurlent à plein poumon en tribunes et devant leurs écrans. Il y a les joueurs, et puis il y a les supporters. Et depuis plusieurs années, ces deux univers s’entrechoquaient du côté de la capitale française, faute de réconciliation.
Pourtant portés par deux même couleurs – ce rouge et bleu si prestigieux – club et amateurs se réservaient leurs émotions, chacun de leur côté, à défaut de partager à l’unisson. D’abord parce que certaines mesures liberticides ont empêché les plus anciens supporters de vivre leur passion dans l’enceinte des stades (suite au fameux plan Leproux, depuis 2010), puis parce que les rares mains tendues par le club ont été des échecs (en témoigne la tentative ratée de célébration du titre en 2013 avec les débordements que l’on connaît).
Parce qu’il a fallu du temps, au PSG, pour comprendre que les minorités violentes ne faisaient pas la majorité qui supporte. Il lui a fallu du temps pour comprendre aussi que la pacification totale du stade rimait aussi avec l’éradication de toute forme d’ambiance. Que le passé appartenait au passé, mais que les Ultras parisiens pouvaient aussi se conjuguer au présent et pourquoi pas au futur, avec un peu de volonté.
« C’est une vraie fausse bonne idée. Au PSG, ambiance a souvent rimé avec violence. Personne ne comprendrait que le club revienne en arrière après avoir solutionné ce grave problème. Il faut arrêter avec les énièmes chances données », jugeait pourtant Antoine Boutonnet, le responsable de la Division nationale de lutte contre le hooliganisme (il a quitté son poste début 2017), dans les colonnes de L’Equipe en juin 2016.
Cette volonté, pourtant, elle été initiée par le président du PSG, qui s’est parfois opposé à certains en interne pour ouvrir un peu plus les portes du club aux supporters historiques, et s’est ouvertement affranchi des consignes de la préfecture de police et de son responsable de la sécurité du stade, Jean-Philippe d’Halivillée. Parce qu’il fallait aussi revenir à des fondamentaux et que la réussite des joueurs, comme la visibilité d’un club, passent également pas son public, bien souvent. Matuidi comme Kurzawa ou Aurier, en se prononçant à plusieurs reprises publiquement pour le retour de ces supporters, ont en tout cas fait germer l’idée au sein du club.
En interne, on nous confie d’ailleurs que tous ont été dans cette volonté unanime de redonner une âme au Parc des Princes, une ferveur à l’un des clubs les plus prestigieux du continent, quitte à devoir redoubler de détermination face aux plus réticents. Notamment pour le président, qui n’a jamais baissé les bras devant des pouvoirs publics plus que sceptiques (en témoignent les 9 arrêtés préfectoraux qui ont interdit ces mêmes supporters de déplacements à l’extérieur cette saison).
Côté supporters, c’est la reconstitution d’une vraie association de supporters, via le Collectif Ultra Paris et sous l’impulsion de l’ADAJIS (Association de Défense et d’Assistance Juridique des Intérêts des Supporters), qui a été le déclencheur d’une nouvelle ère. Le CUP – réunion de plusieurs groupes parisiens et de supporters « lambda » qui souhaitent donner de la voix, s’investir socialement pour la ville de Paris, organiser les déplacements et œuvrer pour le retour des Ultras au sein du Parc des Princes – s’est tout de suite fixé des limites. Pour preuve, tous les adhérents (listés par le PSG) ont signé une charte de bonne conduite et se sont attachés à ne pas trop bousculer la direction parisienne, en attendant qu’elle s’assouplisse devant tant de compromis. Et le défi est relevé puisque peu à peu, après moult turbulences (boycott, négociations, apparitions et manifestations lors des rencontres des jeunes ou des féminines du club etc.), et de nombreuses discussions encadrée par l’ADAJIS, le PSG a enfin laissé les Ultras revenir.
« C’est grâce au président Nasser, il a été à l’origine de tout, même si nos actions pacifiques ont également dû jouer un rôle. Il a réussi à convaincre le préfet d’un retour des Ultras. Sans lui rien n’aurait été possible, il nous a fait confiance, et on le lui rend bien », nous a par ailleurs expliqué Wissam, l’un des leaders qui pilote le CUP.
Depuis octobre 2016, pied par pied, banderoles par banderoles, ce sont d’abord quelques dizaines, puis quelques centaines d’Ultras qui ont pu se réunir du côté de la tribune Auteuil du Parc des Princes, avant que les leaders autrefois refoulés puissent eux aussi revenir à la maison.
Le tout, au nez et à la barbe des services de sécurité du stade, et de la Préfecture de police, qui a tenté vainement de freiner ce come-back.