[Focus n°9] Julio César Dely Valdés, buteur aux dents en or

Certaines familles sont destinées au football. Certains frères le sont également. Et parfois, parmi eux, certains marquent l’histoire d’un pays. C’est le cas de Julio César Dely Valdés. Né le 12 mars 1967 à Colón au Panama, le jeune Julio et son frère jumeau Jorge, derniers d’une famille de huit enfants, veulent suivre les traces d’Armando, le grand frère, et s’inscrivent à l’Atlético Colón en 1976. « Les enfants regardent vers les Etats-Unis, moi je ne regardais nulle part, et je ne me suis jamais figuré que j’irais aussi loin. »  C’est un an plus tôt que son jumeau, également attaquant, que Julio quitte son club formateur pour rejoindre en 1987 le Deportivo Paraguayo, club argentin de la ville de González Catán. Il n’y restera qu’un an, mais inscrira 28 buts en 33 matches et, après un rapide passage au club argentin d’El Porvenir, tapera donc logiquement dans l’oeil du Nacional, club urugayen de Montevideo, qui l’achètera 15 000 dollars. Suite à son départ, le club du Deportivo recrutera Jorge, le frère jumeau. Artificier en chef également, les supporters argentins regretteront longtemps de n’avoir jamais pu voir évoluer en même temps les frères panaméens. Un peu comme les frères Derrick des Hot Dog de Hanawa, mais ça c’est pour les fins connaisseurs.

Au Nacional, Julio Dely Valdés carbure. C’est d’ailleurs le club qu’il côtoiera le plus longtemps puisqu’il évolua 5 ans. De quoi inscrire la bagatelle de 46 buts en 89 matches. Dès 1990, il est par ailleurs convoqué en équipe nationale malgré les appels du pied de la sélection uruguayenne. Deux années de suite (1990-1991 / 1991-1992) il sera le meilleur buteur de Primera Division, l’élite du championnat uruguayen. Là-bas, on l’appele Manteca (le beurre), car il liquéfie les défenses adverses comme la chaleur fait fondre le beurre.  Il remporte son premier trophée lors de la saison 1991-1992 en devenant Champion d’Uruguay aux côtés de son frère jumeau venu le rejoindre cette année, mais peu prolifique. L’Histoire voudra même que la fratrie au complet s’affronte cette saison-là, Armando Dely Valdés évoluant depuis peu au CA Peñarol, l’ancien club de Cristian Rodriguez et Carlos Bueno. Les bonnes performances de Julio attisent l’intérêt d’un club européen, celui de Cagliari. L’attaquant panaméen fait donc ses valises, en compagnie de sa femme uruguayenne Maria-Alejandra, et s’envole direction l’Italie, malgré l’intérêt de l’Atalanta et de l’OM, dans l’espoir de faire briller les couleurs de son pays.

Julio Dely Valdes arrive donc en Europe et, sous les ordres d’un Luigi Radice rapidement remplacé par feu Bruno Giorgi, confirme son potentiel. Il disputera sa première saison 32 matches de Serie A et inscrira 13 buts. Il évoluera aux côtés de Luis Oliveira qui le décrit comme étant un attaquant complet, fort physiquement, avec une grande technique et très fort de la tête. Il découvrira également la C3 et inscrira un but en 4 matches. Sa seconde saison fut moins prolifique puisqu’il trouvera le chemin des filets 8 fois en 32 rencontres. Mais le PSG, fraîchement amputé d’un Georges Weah parti à l’AC Milan, est intéressé et l’achète 35 millions de francs. Deux ans après son arrivée en Europe, Julio Dely Valdés rejoint le PSG de Luis Fernandez. « Dès le lendemain de mon dernier match contre la Juve, des rumeurs me sont parvenues. Je suis très flatté d’avoir été conseillé par les dirigeants milanais auprès de Michel Denisot. Paris est une équipe parmi les meilleures en Europe, et Paris n’est pas une ville comme une autre. »

La première saison de Julio au PSG est bonne. Il dispute 33 matches de Division 1 et marquera presque un match sur deux puisqu’il trompera les défenses françaises 15 fois. L’attaquant panaméen remportera son tout premier trophée européen le 3 janvier 1996. Le PSG participe alors à la première édition du Trophée des Champions et se déplace donc au Stade Francis-Le Blé de Brest pour y affronter le FC Nantes, Champion de France en titre. Les deux équipes se rendent coup sur coup mais iront jusqu’aux tirs au but, n’ayant pu se départager (2-2). Julio Dely Valdés convertit sa tentative suite à l’échec de Patrick Colleter tandis que, côté nantais, Christophe Pignol et Claude Makélélé échoueront (6-5). Le PSG remporte la première édition du Trophée des Champions et Dely Valdés son premier trophée européen. De quoi faire briller son incisive et sa canine couleur or. « Mon frère jumeau a les deux mêmes dents en or que moi, c’est simplement une mode, il y en a bien qui se percent le nez, c’est pareil. » Il participera également à six matches de Coupe d’Europe des vainqueurs de coupe et marquera une fois. Toutefois, il ne sera pas titulaire pour la finale face au Rapid Vienne mais il entrera rapidement en jeu en remplaçant Raï dès la onzième minute de jeu. Julio Dely remporte donc la C2 ce fameux 8 mai 1996 et finira vice-champion de France, à 4 points de l’AJ Auxerre de Guy Roux. Sa seconde saison sera toutefois plus compliquée et l’attaquant panaméen peine à s’imposer dans ce PSG. En championnat, il ne marque que 8 fois en 31 matches mais performe en coupe avec 2 buts en 3 matches. Il aidera également le PSG en inscrivant 3 buts en 7 matches de C2 et participera également à la large défaite parisienne en Supercoupe face à la Juventus Turin, perdue 1-6. L’attaquant panaméen, que l’on appelle désormais Panagol, décide donc de partir en Espagne pour se relancer et s’engage au Real Oviedo lors de l’été 1997.

Il restera 6 ans en Espagne. Il évoluera trois ans à Oviedo malgré une mauvaise première saison. Pourtant, la suivante fut sa meilleure. En 37 matches de Liga, Julio Dely Valdés trouva 19 fois le cadre, son record en Europe. Le Panaméen fait d’ailleurs partie des tous meilleurs buteurs de l’histoire de Malaga en première division et forme un duo redoutable avec Dario Silva, la doublette se fait d’ailleurs appelé Le Double D. Mais malheureusement, il peine à maintenir son niveau de performance et sera moins efficace la saison suivante, le contraignant à rejoindre le club de Malaga. S’il marque un but sur deux dès son arrivée, un drame vint donner un virage décisif à sa carrière. Le 29 mai 2001, son frère Armando fait une crise cardiaque et tombe dans le coma. Les statistiques de Julio César baissent au fil des mois et, après trois ans à Malaga et une coupe Intertoto en 2002, met un terme à sa carrière européenne et rentre donc sur son continent natal.

Julio Dely Valdés fait son grand retour au National lors de l’été 2003 après avoir été élu meilleur athlète panaméen du 20ème siècle, mais n’y restera que six mois. Le coma d’Armando ayant contraint les jumeaux à rentrer au pays pour rester soudés, l’état végétatif du grand frère cachant à l’extérieur le mal qui ronge Armando, souffrant de septicémie et d’une infection des poumons. Julio décide donc de revenir au Panama et évolue alors au Depor Arabe Unido, près de son frère. Le club donna d’ailleurs le nom d’Armando Dely Valdés au stade de la ville quand le grand frère décéda le 17 août 2004. C’est en 2006 que Julio Dely Valdés met un terme à sa carrière et devient entraîneur. Il met également fin à sa carrière international après avoir démontré qu’il faisait partie des plus grands buteurs du Panama. Il a participé à toutes les phases de qualifications de Coupe du Monde de 1990 à 2006 et participe à la Gold Cup 2005 où le Panama réussit le plus grand exploit de son histoire en terminant deuxième, battu en finale par les Etats-Unis (0-0, 3:1 aux tab)

La gloire panaméenne devient d’abord sélectionneur en 2006 et prend en main le Panama pour une durée fixée à 10 mois, lui si attaché à son pays. « J’ai réalisé en 1989 (année de la crise qui amena les USA à écarter le général en place Noriega du pouvoir) qu’on pouvait m’interdire de quitter mon pays… Je ne comprend pas grand-chose à la politique, mais depuis cette date, les choses ont beaucoup changé, surtout à Colon: c’est pire qu’avant. J’en ai pleuré de voir cette misère. Tout cela me déplaît beaucoup parce que le Panama est un pays riche grâce au commerce, et j’ai du mal à croire qu’il n’y a pas de boulot pour tout le monde. » Après 60 % de victoires en 5 matches et une élimination au dernier tour de qualifications à la Gold Cup, il décide de s’occuper des U20 durant deux ans et succombe à l’offre faite par Malaga qui, en 2008, lui propose de devenir l’adjoint de Malaga où il reste deux ans, jusqu’au rachat du club. Dely Valdés retourne donc au Panama et, avec son jumeau Jorge, prend de nouveau les rênes de la sélection nationale durant trois ans, tout en passant sa formation d’entraîneur en vue d’officier en Espagne. Débarqué de son poste, l’ancien attaquant fut durant six mois l’entraîneur de l’Arabe Unido et tenta, chaque semaine, d’apporter de la joie dans le stade qui porte le nom de son frère tant aimé.

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