Focus #14 Mustapha Dahleb, le Fennec qui a conquis la capitale

Régulièrement, Canal Supporters vous propose de revenir sur la carrière d’un joueur passé par le PSG. Pour ce 14ème numéro, nous avons retracé la carrière sportive de Mustapha Dahleb, mais également les passages de sa vie qui ont fait l’homme qu’il est. Focus sur Mustapha Dahleb.

Né à Bejaïa en Algérie le 8 février 1952, Mustapha Dahleb voit le jour en Kabylie. Mais tôt, très tôt, la famille Dahleb émigre en France, dans les Ardennes. Ayant trouvé un emploi dans la région, Dahleb père s’installe d’abord avec femme et enfants à Flohimond, commune à la frontière franco-belge. Tout d’abord adepte du cyclisme, le jeune Mustapha se met au football à l’âge de dix ans. Avec une technique et une rigueur athlétique au-dessus de la moyenne, le jeune Algérien se fait rapidement repérer par l’UA Sedan-Torcy, club phare de la région renommé par la suite CS Sedan-Ardennes. Là-bas il tape dans l’œil de Louis Dugauguez, futur sélectionneur de l’équipe de France. Monsieur Louis est le bâtisseur du club dans sa grande époque, et l’entraîneur tombe littéralement sous le charme de Mustapha Dahleb. Il lui fait alors signer, à seulement 14 ans, un contrat pro stagiaire. A l’époque, l’Algérien devient le plus jeune joueur de l’histoire à disposer en France de ce type de contrat. Alors en plein dans une formation d’électrotechnicien, Mustapha abandonne les études pour se consacrer à sa passion, le football. Au grand malheur de son papa, peu enclin à voir son fils quitter les siens pour taper dans un ballon, mais l’aîné des huit enfants Dahleb le convainc, et, durant huit ans, Mouss se formera à Sedan avant de devenir professionnel en 1969, à l’âge de 17 ans.

1969. Les débuts de Mustapha Dahleb dans cet impitoyable monde du football. Mais à l’époque, ce sport ne requiert pas l’attention mondiale. Le football colle encore aux valeurs de cet homme. 1969. L’année où Mustapha Dahleb aurait pu inaugurer son armoire à trophées, dès sa première saison, mais son club échoue en demi-finale de la Coupe de France face à Bordeaux (0-0/4-3). Cette saison, l’Algérien débute donc son aventure dans le football professionnel. Il joue son premier match de Division 1 face au SCO d’Angers à seulement 17 ans et dix mois. Malheureusement, ce sera sa seule apparition dans le championnat de France et il ne jouera pas plus les deux saisons suivantes puisqu’il ne participera en tout et pour tout qu’à trois matches. Son histoire avec Sedan prend une pause sur ces statistiques puisqu’il devra rejoindre l’Algérie en 1971 afin d’effectuer son service militaire. Direction la terre de ses premiers pas, retour à la maison.

L’histoire peut apparaître anecdotique. Venu seulement deux jours, pour récupérer son sursis militaire, Mouss se voit incorporer par un militaire plutôt malin. Ce n’est donc pas deux jours qu’il restera sur sa terre natale, mais deux ans. En Algérie, Mustapha Dahleb rejoint le CR Belcourt (renommé Chabab Riadhi Belouizdad), l’un des meilleurs et plus prestigieux club du pays. Au début, il n’a pas la confiance du coach mais, au fil des matches, s’affirme, inscrit 12 buts en 20 matches et remporte la Coupe du Maghreb des clubs champions. Ses performances attirent l’œil de la sélection militaire algérienne et participe à son premier match le 24 novembre 1971 face à la Libye. C’est en septembre 1973 qu’il revient à Sedan et qu’il explose enfin. Durant cette saison, il inscrira 17 buts en 27 matches mais ne pourra empêcher la relégation de son club en seconde division. C’est à ce moment-là que le PSG se lance à l’assaut du joueur et compte bien profiter de la descente de Sedan pour sauter sur l’occasion. Le club de la capitale n’est pas seul sur le coup puisque le Real Madrid, Anderlecht et Reims sont sur les rangs. Mais la capitale est belle, et le club également. L’histoire d’amour avec le PSG va commencer…

C’est donc lors de l’été 1974 que Mustapha Dahleb débarque au PSG sous les ordres de Just Fontaine. Premier record pour l’Algérien : son prix d’achat. C’est pour un montant de 1,35 millions de francs, une somme encore jamais atteinte en France à l’époque, qu’il rallie Paris. Si sa première saison est excellente, celle du PSG l’est bien moins puisque le club de la capitale termine quinzième de Division 1. Mais Dahleb impressionne grâce à ses 13 buts en 29 matches. Sous les ordres de Just Fontaine, l’Algérien est bon, très bon, mais c’est dirigé par Velibor Vasovic qu’il deviendra excellent. L’entraîneur yougoslave replace Mustapha Dahleb en meneur de jeu, et l’international algérien rayonne. Élu en 1977 meilleur joueur étranger à évoluer en France, il devient le pilier de ce beau PSG et, face à l’OM qu’il aide à étriller 5-1, il dédie la victoire à Daniel Hechter, démis de ses fonctions et dont il est très proche. C’est dans la tribune que le meneur de jeu offrira le ballon du match à son ami.

« On dis que quand Dahleb ne jouait pas au Parc, la Tour Eiffel se Penchait de chagrin. »

Francis Borelli


En 1982, Mustapha Dahleb, numéro 15 floqué dans le dos, participe à la CAN organisée en Libye mais ne marque pas. C’est la troisième fois que les Fennecs participent à cette compétition et, cette année, se hissent jusqu’en demi-finale mais perdront face au Ghana, futur vainqueur. Lors de la petite finale, les Algériens perdront face à la Zambie et termineront quatrième. Ce qui peut toutefois s’apparenter à une bonne prestation puisque le duo des sélectionneurs Guennadi Rogov-Mohamed Maouche n’est plus à la tête de la sélection seulement quelques jours avant le début de la compétition et c’est donc Mahieddine Khalef qui est à la tête de l’Algérie. Un scénario réitéré il n’y a pas si longtemps que ça au passage…

L’histoire avec le PSG sera si belle qu’il sera le capitaine des premiers trophées parisiens. En 1982, le club de la capitale soulève sa première Coupe de France en battant l’AS Saint-Etienne de Michel Platini après un match d’anthologie (6 tab à 5 suite à une égalisation arrachée en toute fin de prolongation). Décidément, cette saison 1981-1982 sera particulière pour Dahleb puisqu’il sera de la partie pour participer à la Coupe du Monde. Le Parisien brille en phase de poules face à l’Allemagne, ou plutôt la RFA. Une victoire qui, avec stupéfaction et effroi, finira en fait par éliminer les Algériens car il provoque le célèbre « Match de la honte ». La RFA affronte l’Autriche dans un match qui décidera du sort de l’Algérie puisqu’une petite victoire allemande suffit à qualifier les deux nations germanophones et ainsi éliminer les Fennecs. Dix minutes de jeu et un but de Horst Hrubesch plus tard, les 22 joueurs se livrèrent à un jeu de passes inoffensif durant l’intégralité de la rencontre. Honteux, scandaleux, peu d’adjectifs permettent de qualifier ce semblant de match, ce manque de respect. Une supercherie austro-germanique. Et les Algériens rentrent à la maison. Et Mustapha Dahleb rentre à Paris.

Revenons-en au PSG où l’exploit de la Coupe de France sera réitéré un an plus tard en décrochant une seconde Coupe face à Nantes. Une nouvelle ère de trophées qui rime avec les premiers émois européens du Paris SG. Le PSG de Mustapha Dahleb, lors de la saison 1982-1983, se qualifie jusqu’en quart de finale de la Coupe des Coupes. Malheureusement, les Parisiens se feront éliminer face au club belge de Waterschei malgré une victoire aller 2-0 devant 49 575 spectateurs, record d’affluence du Parc des Princes. Le premier grand rendez-vous européen de ce club encore si jeune. Ce sera l’avant-dernière campagne européenne de Mustapha Dahleb puisque, en 1984, il quittera le club à qui il a tant apporté. Le club qui lui a aussi tant apporté. Si le chapitre se clôture, le roman d’amour semble encore aujourd’hui être une histoire sans fin. Dix ans. Dix ans au PSG. Cela semble utopique de nos jours, presque une hérésie aux yeux des nombreux mercenaires qui parcourt le monde du football tels des intérimaires du sport. 310 matches, 98 buts dont 85 en Division 1, le cinquième meilleur buteur du PSG toutes compétitions confondues. Beaucoup de matches certes, mais pas assez, Mouss souffrant d’un genou fébrile et enchaînant souvent les blessures.

« J’ai un faible pour Mustapha Dahleb qui a marqué son époque. Il avait un talent exceptionnel, c’est un créateur qui a le profil des joueurs dont on parle aujourd’hui comme Messi. Dahleb avait du génie avant tout, il était capable de tout. C’est le meilleur joueur de l’histoire du PSG. »

Raymond Domenech

Histoire de finir sur une note ensoleillée, aux goûts d’azur, Mustapha Dahleb s’engage à l’OGC Nice, alors en Division 2. Le temps d’une saison, le temps d’aider le club à retrouver l’élite. Il est temps pour l’amoureux du Parc de prendre sa retraite et de retrouver la ville de ses exploits, de ses émois, de ses amours. Il s’installe donc en région parisienne et aide l’insertion des jeunes en participant à des actions caritatives. Techniquement et physiquement hors-norme, Mustapha Dahleb était clairement un joueur un part, sûrement né dix ans trop tôt. En 2001, il est d’ailleurs élu Fennec du Siècle (meilleur joueur algérien de tous les temps), en 2003 il est fait Chevalier de la Légion d’Honneur par Jacques Chirac. En 2004, il reçoit l’étoile d’or algérienne par le magazine Compétition. Il est et restera l’un des tous meilleurs joueurs de toute l’Histoire du PSG et, ad vitam eternam, restera dans le cœur des Parisiens. Il était une fois un Fennec qui conquis la Capitale. Et bon sang, que l’histoire fut belle.

Les précédents « focus » sur les anciens Parisiens
Focus #9 : Julio César Dely Valdés, buteur aux dents en or
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